On identifie souvent Bulle Ogier aux constellations éclatantes auxquelles elle a appartenu à tel ou tel moment. Les compagnons de jeux de Marc O - c'était le temps de Pierre Clementi. Ou, aussi bien,les habitués de la Coupole - parmi lesquels Alain Tanner qui la distingua pour La Salamandre. Bulle Ogier, en même temps, demeure retranchée dans le silence. De son amour avec Barbet Schroeder, elle dit seulement: "ce fut une relation qu'on peut dire personnelle". Et elle ne souffle mot de sa fille Pascale, cueillie par la mort au lendemain de ses premiers succès. Le silence mais pas l'abandon. "Je ne me suis pas exclue moi-même, dit-elle, je me sens souvent avec une émorme énergie et quand même du talent mais j'ai les bras qui tombent parce que les systèmes de production et de distribution sont tels qu'un metteur en scène ne peut pas aisément travailler avec moi." Au fond, elle ne pensait pas que la pellicule pouvait l'inscrire en tant que personne: "Cela ne me venait pas à l'esprit". Peut-être est-ce cette simplicité qui lui a permis de frayer avec les plus grands, de Téchiné à Rivette en passant par Allio. Et, qui plus est - qu'on pense à Marguerite Duras - les traces qu'elle laisse au théatre sont aussi belles et fortes que celles qu'elle laisse dans le cinéma.
Par Jean Douchet, réalisation François Caunac