Le parc national des Cévennes a reçu, lundi 13 août, le label mondial "Réserve internationale de ciel étoilé". Seuls 13 parcs au monde bénéficient de cette appellation, qui récompense la qualité du ciel et l'absence d'éclairages nocturnes.

Le parc national des Cévennes, c'est donc reconnu, met littéralement des étoiles plein les yeux. L'International Dark-Sky Association (IDA) lui a remis, lundi 13 août, le label "Réserve internationale de ciel étoilé". Le parc rejoint ainsi le club très restreint des lieux ayant obtenu cette récompense : il devient officiellement le treizième parc au monde à recevoir ce statut, et rejoint la NamibRand Nature Reserve, en Namibie, ou le Aoraki Mackenzie en Nouvelle Zélande. En France, le parc national du Pic du Midi bénéficiait déjà de ce label.
Si dans le monde, plus de deux tiers de la population ne connaît plus de nuits noires en raison des éclairages artificiels, en Europe, le chiffre s'élève à plus de 90 % des habitants. Le parc national des Cévennes, à cheval sur les départements de la Lozère, du Gard et de l'Ardèche sur une superficie de près de 2 800 km², permet d'accéder, au cœur du parc, à une qualité de ciel préservée des éclairages nocturnes.
En décembre 2009, dans Hors-Champs, l'astrophysicien et vulgarisateur André Brahic regrettait que le ciel soit de moins en moins accessible :
Nous sommes tous des enfants. Et quand on scrute le ciel, que l'on ait 80 ans, 110 ans, 3 ans ou 7 ans c'est extraordinaire... et actuellement nous ne voyons plus le ciel à cause de la pollution lumineuse. 50 % de la population mondiale ne voit plus la Voie lactée. Or je dis à tout le monde, allez passer quelques nuits à la belle étoile, quand il n'y a aucune lumière dans les 400 km à la ronde. Ce qui m'est arrivé il y a pas longtemps, dans le désert du Ténéré, dans le Sahara [...]. Il n'y avait aucune lumière, je ne voyais plus la Terre, je flottais dans l'espace.
Des critères contraignants
Le parc national des Cévennes avait envoyé sa candidature au label il y a un peu plus d'un an. Grâce à une campagne participative de mesure de la luminosité du ciel, une base de données avait été envoyée à l'IDA. Si l'association a récompensé cette démarche par l'attribution du statut de "Réserve internationale de ciel étoilé", ce label n'en demeure pas moins contraignant : il implique un engagement sur le long terme des acteurs locaux. Il devrait permettre, notamment, de justifier la valorisation de ce patrimoine préservé et de lancer des programmes de rénovation des éclairages publics des communes alentours.
Car en matière de pollution lumineuse, la France a encore des progrès à faire. En 2008, déjà, le projet de loi Grenelle 1 prévoyait de réduire les émissions de lumière artificielle quand elles risquaient de "présenter des dangers ou de causer un trouble excessif aux personnes, à la faune, à la flore ou aux écosystèmes, entraînant un gaspillage énergétique ou empêchant l’observation du ciel nocturne". En 2013, un arrêté devait réguler l'usage excessif de lumières artificielles la nuit : sans succès, selon l'Association Nationale pour la Protection du Ciel et de l’Environnement Nocturnes, qui dénonçait en 2017 l'absence de suivi des pouvoirs publics quant à l'application de cette mesure.
La pollution lumineuse a d'ores et déjà un impact déterminant sur les écosystèmes nocturnes, des papillons de nuit aux oiseaux, en passant par les mammifères ou les tortues, dont les nouveaux-nés à peine éclos sont attirés par les lumières, et donc plus facilement victimes de prédateurs.
Pour André Brahic, il est d'autant plus dommage de voir disparaître notre ciel nocturne qu'il est, aussi, à l'origine des questionnements de l'humanité, poursuivait-il en racontant son expérience dans le désert du Ténéré :
Si je me réveillais dans la nuit, pas besoin de regarder une montre : la voie lactée avait tourné, comme les aiguilles d'une montre. J'ai compris cette nuit-là ce qu'avaient ressenti nos ancêtres il y a 3 000 ans, 4 000 ans... Ceux qui ont démarré la philosophie, les grandes questions. Qui sommes-nous ? Que faisons-nous ? Où allons-nous ? Y'en a-t-il d'autres ? Comment tout cela a démarré ? On ne peut pas ne pas se poser ces grandes questions de philosophie, on ne peut pas ne pas aimer la peinture, la sculpture, la musique, la poésie, quand on voit tout cela !