« Quand le droit bavarde, le citoyen ne lui prête qu'une oreille distraite », belle formule de Françoise Chandernagor et plus que jamais d'actualité. Qui sait qu'aujourd'hui la moitié des lois votées sous le gouvernement Villepin ne sont toujours pas appliquées ? Et pourtant l'activité législative est frénétique. Nicolas Sarkozy impose au Parlement un rythme effréné, qui se traduit par un encombrement sans précédent de l'ordre du jour : « embouteillage à l'Assemblée » ont même titré certains journaux. Mais la chose ne date pas d'hier, en réalité, la situation s'est considérablement dégradée depuis une quinzaine d'années. Les lois sont de plus en plus nombreuses, et de plus en plus longues. Au point de créer un état d'insécurité juridique pour les professionnels, qui comme les avocats ou les entreprises peinent à suivre l'empilement des textes, faute de cohérence générale. Aujourd'hui, une loi adoptée peut être modifiée deux à trois fois dans l'année. Des conseillers d'Etat confient même examiner parfois des projets de loi ou d'ordonnance qui viennent modifier des projets de loi ou d'ordonnance qui ne sont pas encore publiés. Mais à quoi tout cela rime-t-il ? Quand on se penche sur les secteurs les plus touchés par ces phénomènes d'inflation, la sécurité et l'immigration, la politique de l'emploi, le droit du travail et la fiscalité, on comprend tout de suite que le degré de sensibilité de l'opinion publique n'est pas indifférent à ces dérives. Un professeur de droit constatait sévèrement que tout sujet du 20 heures est un projet de loi potentiel. Mais peut-on continuer encore longtemps comme cela sans provoquer la paralysie du système ? Comment expliquer surtout, alors que presque tous nos voisins ont pris la question très au sérieux, que la France continue dans cette voie, voire s'y complaise ?