Au sommaire de cette Dispute : un Petit Salon de Lucile Commeaux, "Synonymes" de Nadav Lapid et "Los Silencios" de Beatriz Seigner. Enfin, un coup de coeur de Murielle Joudet pour "The Intruder" de Roger Corman (1962) qui sort en version restaurée sur DVD et Blu-Ray le 10 avril.

"Synonymes" de Nadav Lapid (en salles)
Synopsis : Yoav, un jeune Israélien, atterrit à Paris, avec l'espoir que la France et la langue française le sauveront de la folie de son pays.
L'avis des critiques :
Il y a l’idée de dispositif derrière le film. Toutes les scènes se réinventent en permanence. Cela crée quelque chose de surprenant et d’hétérogène. Cette hétérogénéité peut agresser mais je la trouve très belle et assez nouvelle dans le cinéma français. Murielle Joudet
Je vois dans ce film une forme de radicalité sur la question de l’identité superposée à cette question de la fin d’un monde occidental totalement peiné par ce qui se passe. Cela créé des effets de nostalgie, des questionnements sur ce qu’est l’exil. Lucile Commeaux
Ce film est symptomatique d’un mal-être assez profond qui touche le cinéma d’auteur mondial. Je le trouve très racoleur et faussement profond. Je ne suis pas sûr qu’il ait grand-chose d’intéressant à me raconter. Arnaud Laporte
L’idée fondamentale du film est de le mettre en collision Tom Mercier avec d’autres gens, de nouveaux décors, de nouvelles situations. Ce que je trouve moins intéressant est cette espèce de triangle amoureux. On est dans une sorte de redite d’un nombre de films incalculables. Florence Colombani
"Los Silencios" de Beatriz Seigner (en salles)

Synopsis : Nuria, 12 ans, Fabio, 9 ans, et leur mère arrivent dans une petite île au milieu de l’Amazonie, aux frontières du Brésil, de la Colombie et du Pérou. Ils ont fui le conflit armé colombien, dans lequel leur père a disparu. Un jour, celui-ci réapparait mystérieusement dans leur nouvelle maison.
L'avis des critiques :
La douceur du film m’a beaucoup fait penser à « Cemetery of Splendour » d’Apichatpong Weerasethakul, qui, sous des dehors de films tranquilles ou calmes, était un film très profondément politique. Il y a une familiarité entre ces univers qui me touche profondément. Arnaud Laporte
La charge politique souffre beaucoup de ne pas avoir été assumée comme un objet ethnologique, anthropologique. J’ai pris du plaisir à voir ce film mais cela ne m’interroge sur rien. Lucile Commeaux
Il y a des petits détails dans la matérialité et dans l’intimité de la vie familiale partagée qui sont captée avec beaucoup de finesse. Dès qu’on est dans cette part plus ouvertement magique, on est aussi dans cette métaphore qu’on comprend un peu trop vite et qui me paraît moins captivante. Florence Colombani
Beatriz Seigner prend le temps de raconter son histoire quitte à même la raconter trop tard. Elle laisse les choses advenir d’elles-mêmes. Il n’y a pas de surmoi d’auteur mais une intention d’auteur. Murielle Joudet
>> LE COUP DE COEUR DE MURIELLE JOUDET : "The Intruder" de Roger Corman (sortie DVD et Blu-Ray en version restaurée le 10 avril)

Présentation du distributeur : Réalisateur connu pour ses nombreux films de genre, Roger Corman est également l’auteur d’un chef-d’oeuvre du film noir, The Intruder, tourné en 1962. Véritable brûlot politique, ce film rappelle les grandes heures du néoréalisme italien à travers ce témoignage d’un temps où la haine, la peur de l’autre et l’intolérance étaient encore la norme d’une certaine Amérique.
Plus de cinquante ans après, cela serait une banalité de dire que le film est encore d’actualité. J’irai encore plus loin en disant que peu de films américains contemporains peuvent prétendre regarder avec autant de lucidité et de pureté la société américaine comme le fait "The Intruder". Murielle Joudet
LE PETIT SALON DE LUCILE COMMEAUX : Comment filmer les gilets jaunes ?
Je trouve le film de François Ruffin problématique à plein d’égards mais c’est aussi extrêmement courageux. Cela pose beaucoup de questions cinématographiques, esthétiques. Il y a de vraies questions de mise en scène dans le film. Lucile Commeaux
Le dossier des Cahiers du Cinéma pose au fond la question de ce qu’est qu’enregistrer le présent par le cinéma, là où c’est la télévision qui occupe le terrain et qui fait partager au peuple concerné les événements en direct. Je ne sais pas si on peut porter, au cinéma, des réponses contemporaines à des évènements qui sont en train de se dérouler. Florence Colombani
Le film de François Ruffin est efficace car il se pense comme un film d’action politique. Il permet aux gens de parler après sa projection. Certaines critiques lui reprochaient sa laideur esthétique. C’est symptomatique car il y a un sentiment urgence. Le film veut redonner de l’énergie pour une sorte d’acte II. Cela me semble justifié, la parole compte plus que l'ornementation cinématographique. Murielle Joudet
♪ Générique de l'émission : Sylvie Fleury & Sidney Stucki, "She devils on wheels", extrait de l'album "Sound Collaborations 1996-2008" (label Villa Magica Records).
- Critique de cinéma
- Critique de cinéma, écrivaine et réalisatrice
- Productrice déléguée de La Dispute