Qu'est-ce que la résilience ? Au début du XX siècle, Paul Claudel qui fut vice-consul à New York en parlait dans les termes suivants : « Il y a dans le tempérament américain une qualité, qu'on traduit là-bas par le mot de résiliency pour lequel je ne trouve pas en français de correspondant exact, car il unit les qualités d'élacticité, de ressort, de ressources et de bonne humeur ». Aujourd'hui, toute une psychologie spontanée s'est développée autour du stress, du traumatisme, de la victimologie. La résilience y a pris une place et il n'est pas une saison où des découvertes nouvelles en neuropsychologie ne viennent montrer la plasticité de notre cerveau. La faculté de rebondir après une dépression, de se rétablir après un échec, de se reconstruire après une séparation, de renaître après un effondrement, sont des expressions qui se sont imposés dans nos vies personnelles, comme elles s'appliquent à notre histoire politique et à notre roman national. De même qu'à la reconnaissance des traumatismes de la guerre s'est superposée et parfois substituée une exigence de réparation, la résilience a souvent pris le pas dans l'espace public sur les dégâts subjectifs, les débâcles familiales, et la misère sociale. Les effets parfois réducteurs et amplificateurs de la médiatisation de la résilience ont introduit une certaine confusion dans la définition que nous faisons du traumatisme et dans la manière dont nous le traitons. Quel rapport en effet existe-t-il entre une blessure traumatique comme la maladie d'Alzheimer et un traumatisme sexuel, quel rapport entre une blessure cérébrale et une blessure psychique ? De quoi la résilience a-t-elle besoin pour se construire ? En un mot, qu'est-ce que la résilience ?