Eglise catholique: le synode sur la famille

Alors que vient de s’ouvrir à Rome le synode sur la famille, que certains qualifient déjà de Vatican III, le débat se poursuit dans la presse
Le théologien et bibliste André Paul exprime dans les pages Idées de Libération ses doutes profonds quant à la capacité de l’Église à évoluer sur cette question, malgré la position affichée par le pape en faveur d’une ouverture au monde réel. « L’Eglise s’obstine – affirme-t-il – à maintenir un modèle de la famille obsolète à la manière d’une prothèse idéologique, autrement dit, d’une fiction ». Le spécialiste des premiers siècles du christianisme revient sur l’histoire de l’élaboration progressive de la doctrine sur le mariage et rappelle que « le souci de la maîtrise du sexe l’emporte largement sur une véritable problématique familiale ». Le procréationnisme, l’idée que le sexe n’a été créé que pour la reproduction est resté le socle de la pensée catholique du couple et de la famille, sur le modèle encensé par François de Sales de la sexualité des éléphants, qui se retrouvent tous les deux ans pour s’accoupler et perpétuer l’espèce… Michel Foucault observait l’étonnante stabilité des codes en matière de morale sexuelle au sujet de cette fable édifiante, colportée depuis Aristote et Pline l’Ancien, de l’éléphant monogame, fidèle et pudique qui se cache pour faire la chose. C’est donc sans illusion que le théologien « plaide pour une réhabilitation de la dimension érotique dans le christianisme » afin que l’Eglise catholique déclare « que le péché n’est pas lié au sexe ». Ainsi pourrait peut-être s’ensuivre une évolution sur les questions du divorce, de la contraception ou de l’avortement.
Dans les pages Forum&débats de La Croix Gérard Thoris analyse la méthode de communication employée pour traiter des questions de société jugées « délicates »… en politique comme dans l’Église
« Libelles et manifestes se multiplient ; les théologiens, cardinaux ou non, s’admonestent et se répondent par livres interposés », constate-t-il, et certains se sont même regroupés pour mieux peser, comme les évêques africains, les moins enclins au changement et à l’autre bord, les Allemands, les Suisses et les Français. Comme le rappelle Cécile Chambraud dans Le Monde , « tout au long de cette année, le pape a réaffirmé les points de doctrine qu'il juge intangibles : l'indissolubilité du mariage, le refus de la contraception artificielle, du mariage homosexuel et de l'avortement. Pourtant, a-t-il répété aux Etats-Unis, " les familles parfaites n'existent pas " et " les croyants ne sont pas immunisés contre les changements de leur temps " . Pour Gérard Thoris, « le scénario qui a fait basculer l’opinion publique autour de l’avortement, du « mariage pour tous » ou de l’euthanasie » se déroule selon une logique « trinitaire » : compassionnelle, communicationnelle par presse et médias interposés, et pour finir législative. Et c’est la même logique que semble adopter aujourd’hui le pape François : « à ceux qui se poseraient en garants d’une règle ecclésiale, il répond : « Que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre. » Dans un deuxième temps, le Vatican confirme une information diffusée par CNN faisant état d'une rencontre entre François et l'un de ses anciens élèves argentin, homosexuel, avec son compagnon, à l'ambassade de Washington au cours du voyage papal aux États Unis et l’on apprend le coming out d’un prêtre polonais, après que dans les colonnes de La Croix en février dernier on ait pu lire que « dans certaines paroisses d’Allemagne, les prêtres tolèrent déjà l’accès aux sacrements des divorcés remariés. » La troisième phase va se dérouler sous nos yeux. Trois cent soixante évêques, cardinaux et religieux se réunissent pendant trois semaines pour soumettre aux votes un texte qui sera transmis au pape, lequel ne sera pas lié par ses conclusions et publiera ensuite son propre texte magistériel sur la famille. Conclusion du prof à Sciences-po qui fait le parallèle entre le processus de délibération et de décision politique, et le magistère ecclésiastique : « Puissent les décisions du pape François être prises au vent de l’Esprit Saint, « qui souffle où il veut »…
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