Reportage et entretien dans les cuisines du restaurant de Pierre Gagnaire, considéré par ses pairs comme "le meilleur cuisinier du monde".

Nous sommes allés à la rencontre de l’homme qui en 2015 fut élu par ses pairs « meilleur cuisinier du monde »... De fait, pas un chef en France, pas un critique gastronomique qui ne vous dise le contraire. Il est de l’avis général « le plus grand » du moment. Celle qui est devenue sa femme, Sylvie Le Bihan, raconte qu’un jour, un grand gaillard avec une mèche devant les yeux est sorti de ses cuisines. Elle a dit : « Il est beau ce cuistot ». On lui a rétorqué : « Ce n’est pas un cuistot, c’est Pierre Gagnaire ! »

Son logo parle pour lui : il représente une table, mais on peut y voir un dolmen, un signe japonais ou encore la lettre "Pi", symbole de l’infini, qui convient bien à ce génie qui ne s’arrête jamais. Pierre Gagnaire, c’est aujourd’hui 23 restaurants dans le monde, 16 étoiles, dont trois depuis 25 ans dans son fief de la rue Balzac à Paris. C’est là qu’il nous a reçus un peu avant midi...

L’organisation d’une cuisine c’est militaire, dans le bon sens du terme : un projet, un chef, des moyens, et de la discipline évidemment. Mais une discipline assumée, bienveillante, chaleureuse. Nous sommes là pour offrir aux gens quelque chose qui soit du domaine de l’émotion. Donc on ne peut pas être dans la guerre.
C’est un théâtre, notre histoire : un théâtre d’ombre et de lumière. L’ombre, c’est l’assiette très propre, ces hommes de main qui font que tout brille, tout est nickel. Ce sont les machinistes, les éclairagistes, le garçon qui le matin qui fait la poussière, le ménage. C’est une succession de détails qui fait qu’on arrive à quelque chose qui tient la route.
Un repas, c’est une rencontre amoureuse.
Je préfère une erreur à un manque d’émotion. L’émotion, c’est le maître mot de ce que nous faisons.
René Char disait que la soupe chaude ne nourrit pas que le corps, mais nourrit aussi l’esprit, l’âme. Elle est faite pour rassurer. Un sandwich n’a pas la même saveur si vous prenez un petit bout de soleil, si vous êtes confortablement assis au bord d’un platane… tout ce qui fait en sorte que ce que vous ingurgitez a du sens. La nourriture est tellement essentielle, il ne faut pas manger n’importe quoi. Quand je mange un croissant, ça veut dire qu’il est bon, voire qu'il est très bon. C’est comme le jus de fruit le matin, ça n’a aucun sens. On a le choix, tout le temps.
A écouter également, la version longue de notre entretien avec Pierre Gagnaire :
Chroniques
Bibliographie
La Cuisine des cinq saisons de Pierre GagnaireEditions Solar
- Grand chef cuisinier