La Roumanie aux avant-postes de l'Europe
Le président roumain Traian Basescu s’est déclaré lundi très inquiet pour la paix en Mer Noire. Selon lui, Vladimir Poutine tient prêts une « chaîne de conflits », pour l’instant gelés, mais dont il est susceptible d’allumer la mèche, afin de progresser vers la recréation d’une sorte de nouvelle Union soviétique. Géorgie, Ukraine et Moldavie – où la Russie a créé une enclave, la « Transnistrie », où elle a positionné 1 500 soldats, sont autant de risques de chocs avec les intérêts européens. Le ministre des Affaires étrangères Titus Corlatean (social-démocrate) paraît sur la même ligne. Il dit que son pays est « extrêmement préoccupé » par la situation en Ukraine et qu’il redoute une action russe contre la Moldavie. Oui, voilà la Roumanie en première ligne dans la nouvelle « guerre fraîche » (« cool war ») qu’a provoquée Vladimir Poutine en annexant la Crimée. La Roumanie vient d’ailleurs de réclamer que l’Union européenne accepte d’urgence la candidature de la Moldavie, dans l’espoir que cela puisse suffire à dissuader la Russie.
La situation politique intérieure de la Roumanie est caractérisée par l’éclatement, fin février, de la coalition formée autour des sociaux-démocrates Victor Ponta et des libéraux de Crin Antonescu, qui dirigeait le pays depuis 2012. Après les tentatives de destitution du président Basescu, cela accentue une impression d’instabilité politique qui n’est pas justifiée. Depuis les manifestations monstres, qui ont mis un terme prématuré au gouvernement d’Emil Boc, la Roumanie est rentrée dans une période de consolidation politique, qui va culminer en novembre avec l’élection d’un nouveau président – l’inimitié entre Traian Basescu et le premier ministre social-démocrate Victor Ponta est grande. Les sociaux-démocrates semblent capables, cette fois, de faire élire un président plus conformes à leurs attentes. En attendant, la Roumanie poursuit une politique de libéralisation assez audacieuse, même s’il reste à privatiser de grandes compagnies publiques très endettées. La réussite économique de la Roumanie est mal connue dans le reste de l’Europe. La croissance est supérieure à 4%, le déficit public est faible et le chômage, nettement inférieur à celui que nous connaissons en France (7,4 % contre 11%). The Economist se moquait récemment des Anglais qui redoutaient un afflux monstre d’immigrés roumains : pourquoi quitteraient-ils un pays qui se porte assez bien et qui, surtout, se porte de mieux en mieux ? Qui sait, à Londres – ou à Paris – que le PIB par personne à Bucarest est désormais supérieur à la moyenne de l’Union européenne ? Reste que 10 000 médecins et infirmiers roumains ont quitté le pays, ces dernières années, en quête de meilleurs salaires. Alors, la Roumanie, un succès ou un échec ? Qu’en dit-on sur place ?
« Ilot de latinité » dans une « mer slave », ou au contraire, « carrefour » des influences latine, byzantine, slave et ottomane – quelle est celle des deux représentations que les Roumains se font traditionnellement de leur culture qui a en ce moment la faveur du pays ? Se sentent-ils en sécurité dans l’Union européenne ?
L'équipe
Une sélection personnalisée des contenus de FranceCulture.fr
- lisible sur ordinateur et sur mobile
- que vous recevez au rythme désiré et évidemment… gratuite.