La nuit a plusieurs visages
Où il sera question d'une commémoration, d'une histoire qui se répète, de contes de Noël, du sens de l'ennui, de la Russie, et d'un sapin décevant.

C’est l’image d’une histoire qui se répète. Ce sont des visages qui refusent que l’histoire se répète. Des visages fermés, silencieux, qui se tiennent là. Qui se montrent dans leur colère rentrée. Une colère blanche. C’est un rassemblement d’une centaine de personnes. On entend le vent. On entend le froid. Et puis il y a des cris. Nets. Des chœurs qui se manifestent, puis s’arrêtent. Il y a des visages tendus et rougis par le froid, par la tristesse. Celle du souvenir qui se réveille. Des souvenirs aux images impossibles. Il y a les banderoles qui appellent à la fin du massacre en Syrie. Et il y a une rangée de femmes, au premier rang. Coiffées d’un foulard, deux petites bandes noires adhésives qui maintiennent leurs bouches fermées. Ces femmes tiennent toutes dans leurs bras un tas de langes blancs, tachés de rouge surmontée d’une photo d’un bébé endormi. Il y a des regards, attirés par le vide, des visages sans expressions, d’autres pris de larmes. Il y a des souvenirs vieux de 20 ans dont on ne se doutait pas qu’ils puissent remonter à la surface en public, sur une place, par les mots et les images d’une actualité lointaine. Cette place-là se trouve à Sarajevo. Elle est surmontée d’une banderole blanche, à l’écriture noire, en capitale d’imprimerie : « Nous sommes tous d’accord : le massacre doit cesser ». Un mot massacre qui leur semble, dans la langue de l’actualité, trop familier. C’est un rassemblement où les larmes ont plusieurs sens. La colère devant l’histoire qui se répète. Des larmes qui se doivent d’être présentes, qui disent que 20 ans après l’horreur et la violence sans fin, il y a toujours des visages pour témoigner, pour être là pour refuser une quelconque suite au scénario. Un rassemblement qui me rappelle ce petit film de Danis Tanovic réalisé en Bosnie tout juste après le 11 septembre 2001. L’histoire d’un rassemblement de femmes qui chaque 11 du mois se souviennent de leurs maris défunts pendant la guerre. Jusqu’à ce qu’un jour, l’horreur de l’attentat vienne balayer la commémoration. Il y a peut-être un peu de cela ici aujourd’hui sur cette place de Sarajevo. L’idée que dans nos souvenirs les plus douloureux et les plus collectifs, il y a et il y aura sans doute toujours d’autres visages à ajouter.
JUKEBOX
La nouvelle maire de Rome Virginia Raggi est la cible de nombreuses critiques. Notamment accusée d’amateurisme, d’improvisation. Et depuis peu, l'élue se retrouve confrontée à un problème de plus: le choix du sapin de Noël choisi pour orner la piazza Venezia de Rome. Un Sapin long triste et dégarni dont on peut voir la photo sur le blog du Monde.fr, Big Browser. Un sapin sur lequel une guirlande lumineuse semble jetée négligemment. Les Romains en colère ont baptisé cet arbre "le sapin de l’austérité". Pour se défendre la maire de Rome, a déclaré qu’il y avait eu "beaucoup de gaspillage ces dernières années". "Ce sapin ne nous a coûté que son transport et son installation". Mais devant le mécontemement voire la déception des habitants de sa ville, Virginia Raggi a accepté quelques décorations supplémentaires, tout en respectant "une certaine idée de la sobriété".