Jean A. Gili, Michel Ciment et Jean-François Rauger évoquent la sortie en dvd de la "Trilogie de la guerre" de Roberto Rossellini, des films tournés entre 1941 et 1943 dans un contexte fasciste qui pose la question de l'engagement du cinéaste. Ses films sont-ils des films de propagande ?

Aujourd'hui, dans Paso Doble :
Jean A. Gili, critique et historien du cinéma, Michel Ciment, critique de cinéma et rédacteur en chef de la revue Positif et Jean-François Rauger, critique de cinéma et programmateur de la Cinémathèque française, pour la sortie en DVD de trois films de Roberto Rossellini, La trilogie de la guerre : Le Navire blanc, Un pilote revient et L’Homme à la croix, chez Bach Films.
Ces films baignent dans leur temps, ce serait peut-être un peu réducteur de les présenter brutalement comme étant des films de propagande. Ils sont tournés dans un certain contexte, qui tiennent compte de ce que l’Italie est en guerre et que ces films mettent en scène précisément la marine, l’aviation, l’infanterie et que donc évidemment il y a de l’idéologie. Que maintenant ça soit des films faits pour un objectif strictement de propagande, je dirais non parce que Rossellini jouissait d’une certaine liberté et que par ailleurs, il avait toujours cette tendance à représenter certaines situations en cherchant à éviter d' y mettre trop d’idéologie.
Jean Gili

Il y a chez Visconti une résistance au fascisme tandis que chez Rossellini, il y a une adhésion, mais je pense que c’est toute la vie de Rossellini qui est une adhésion aux courants dominants : il a été fasciste quand il fallait l’être, il a été ensuite résistant très peu longtemps avec Rome, ville ouverte parce que les Américains débarquaient dans le Sud de l’Italie et qu'il fallait se refaire une virginité, puis il est redevenu le grand apôtre de la résistance, pour des films magnifiques d’ailleurs, la trilogie du néo-réalisme, et ensuite la démocratie chrétienne allait dominer la vie politique italienne, il est donc devenu démocrate chrétien en faisant des films à la gloire d'Alcide De Gasperi.
Michel Ciment

Ce sont des films de Rossellini dont la dimension humaine dépasse, me semble-t-il, la simple volonté de propagande politique. Elle est là, elle existe, notamment dans certains plans très "Eisensteinien", mais je pense que quand on regarde le détail de ces films, ce ne sont pas des œuvres qui donnent envie de partir à la guerre pour le Duce, et même le film le plus problématique des trois, qui est L’homme à la croix, qui raconte l’histoire d’un aumônier militaire fait prisonnier par les bolcheviks sur le front russe et qui oppose à la barbarie athée sa foi, on peut dire qu’au-delà de tout ça, c’est le premier film où la dimension spiritualiste de Rossellini apparaît de façon aussi évidente. Avant de jeter l’anathème sur les films, voyons-les dans le détail !
Jean-François Rauger


La Chronique mensuelle de Michel Ciment, de la revue Positif
Aujourd'hui, Michel Ciment revient sur le film The Lost City of Z de James Gray, coup de coeur de la rédaction.
Il évoque également le grand dossier consacré à Andrzej Wajda.
The Lost City of Z est une aventure intérieure épique extraordinaire, une épopée intime.
Michel Ciment
Bibliographie
La trilogie de la guerreBach Films, 2017
- Historien et spécialiste du cinéma italien
- écrivain, universitaire, critique de cinéma et journaliste
- Critique et spécialiste du cinéma fantastique