Guerre d'informations et d'images autour du convoi d'aide humanitaire au Venezuela
Les médias internationaux rapportent que l'armée vénézuélienne fait bloquer le pont par où l'aide humanitaire de Colombie. Ce pont est fermé depuis 2016, précise Caracas. L'armée française vole au secours d'Idriss Deby au Tchad. Le Pôle Nord passe à l'Est, prémisse de la fin du Monde ?

Ce matin, une image nous interpelle.
Une image qui s'étale dans la plupart des grands journaux internationaux, mais qui semble presque trop belle, trop parlante.
La première fois où elle m'a frappé c'est dans le Guardian britannique. On y parle du nouvel épisode de la crise au Venezuela. On est à la frontière avec la Colombie, sur la frontière même, au point de passage de Las Tienditas. C'est là que doit passer dans les prochains jours l'aide humanitaire envoyée par les pays occidentaux qui soutiennent l'opposant Juan Guaido, qui l'ont reconnu comme président par intérim et qui, c'est le Guardian qui le dit, veulent "se servir de cette aide humanitaire pour tester la loyauté des militaires vénézuéliens" à leur président contesté Nicolas Maduro.
These are the lengths #Maduro has gone to prevent food & life saving medicine from reaching the people of #Venezuela. But the aid is coming anyway & now the military leaders must make a choice. Will they defend their people or defend a dictator. pic.twitter.com/5Kf5xpt7tC
— Marco Rubio (@marcorubio) February 6, 2019
Et cette photo, justement, nous montre le pont de Las Tienditas, vide, désert, immaculé, en vue aérienne, avec seulement au milieu, barrant les six voies de circulation, deux containers bleus clairs sur les côtés, et au centre une citerne orange. Tout est graphiquement éloquent, limpide dans cette image : le régime chaviste a donc envoyé l'armée, mercredi, installer cette barricade pour empêcher le passage de l'aide humanitaire
Le convoi humanitaire, décrypté toujours dans The Guardian par la politologue Maryhen Jimenez Morales de l'Université d'Oxford, c'est ni plus ni moins qu'un "cheval de Troie envoyé par les alliés de Guaido pour créer une brèche dans le soutien de l'armée à Maduro". A quoi un avocat proche de Juan Guaido ajoute, que l'aide humanitaire va poser "double dilemme fatal à Maduro : soit il laisse passer l'aide humanitaire, et il semblera faible... soit il la bloque, (ce qu'il ne devrait pas faire s'il n'est pas stupide), et il sera aussi perdant".
Pour le moment, à en croire la fameuse photo du pont de Las Tienditas, l'armée de Maduro semble déterminée à tout bloquer. C'est ce qu'elle nous dit, dès le premier regard, et c'est la légende que lui accolent aussi bien Bloomberg l'américaine, La Opinion de Cucuta, le quotidien colombien publié de l'autre côté de la frontière, ou encore à Caracas le journal d'opposition El Universal.
#Frontera | La Guardia Nacional de #Venezuela ubicó dos grandes contenedores sobre el puente internacional Tienditas con el fin de bloquear el paso de ayudas humanitarias #Ayudas#EEUU#Policía#Migraciónpic.twitter.com/A3BIV0wjw6
— Diario La Opinión (@laopinioncucuta) February 5, 2019
Mais il semblerait bien qu'il manque un information à cette légende : VTV, la télévision publique vénézuélienne l'affirme par la voix du plus proche des lieutenants de Maduro, Diosdado Cabello.
Ce que dit Cabello (vers 1'25 sur la vidéo), après une démonstration sur la guerre psychologique et les "fake news" de la propagande américaine, c'est que "ce pont de la Tienditas a été construit par le Vénézuéla seul, achevé en 2016 et qu'il n'a jamais été ouvert à la circulation, suite au refus des Colombiens de coopérer".
C'est donc un pont déjà fermé qui a été fermé, et ça méritait d'être précisé, même ça n'enlève rien au fait que c'est par là que les Colombiens veulent faire passer l'aide humanitaire. "S'ils le font, conclut Cabello, nous le considérerons comme une invasion, un acte de guerre irrégulière, tenez-vous le pour dit".
Beaucoup d'interrogations dans la presse africaine sur l'intervention de l'armée française au Tchad.
Des raids d'avions Mirage 2000 français, confirmés hier par l'état-major, et dont il est question dans Jeune Afrique. Ils ont été effectués dimanche, puis mardi et mercredi, et visaient une colonne de 40 pick-ups : des combattants armées du groupe rebelle tchadien UFR, l'Union des Forces de la Résistance, qui revenaient en territoire tchadien depuis le sud de la Libye.
L'UFR, nous apprend Jeune Afrique, est menée par un neveu du président tchadien Idriss Deby, devenu l'un de ses plus dangereux ennemis. Mais à lire le site d'info Mondafrique, on comprend que le groupe visé n'a rien à voir avec les combattants djihadistes que la France et ses soldats de la force Barkhane sont censés traquer dans la région : il ne s'agirait là que "d'opposants à la quasi-dictature d'Idriss Deby".
L’armée française au secours du Tchad https://t.co/RHfoD3zeMZ#Tchad@Mondafrique
— Mondafrique (@Mondafrique) February 6, 2019
C'est "une ingérence grave de la France dans les affaires internes du Tchad", commente le porte-parole de l'UFR. C'est un "coup de main d'Emmanuel Macron qui s'est senti obligé de voler au secours du dictateur Deby", affirme pour sa part Le Djely, portail d'info guinéen de Conakry cité par Courrier international. Et d'y voir un nouvel acte de la Françafrique, de l'engagement de la France à soutenir les régimes amis dans ses anciennes colonies sans trop regarder s'ils respectent la démocratie et les droits de l'homme.
La Nouvelle Tribune du Bénin cite un responsable du commandement militaire français qui explique, sous couvert d'anonymat, qu'"Idriss Deby reste le partenaire le plus viable et le plus solide dans la région, que les Tchadiens comptent sur la France pour sécuriser la frontière libyenne". Les rebelles de l'UFR, eux, assurent à RFI que les frappes françaises ne les ont pas arrêtés, qu'ils "poursuivent [leur] progression vers la capitale N'Djamena pour y établir un gouvernement de transition réunissant toutes les forces vives du pays".
🇹🇩 🇫🇷 L'intervention des Mirages 2000 français dans le nord-est du #Tchad contre une colonne de l'Union des forces de la résistance est un «tournant dangereux» pour l'opposition tchadienne.
— RFI (@RFI) February 6, 2019
🎤 Gali Ngothé Gatta, chef du parti UFD-PR au 🎙 d'Ibrahim Houda #RFIMatin#AfriqueMatinpic.twitter.com/vNsTuYsH5m
En la matière, deux rappels : historique d'abord, l'UFR avait déjà réussi à approcher du palais présidentiel d'Idriss Deby en 2008, mais pas à le renverser ; géographique enfin, c'est à N'Djamena que la France a choisi d'installer en 2014 le QG de sa force Barkhane au Sahel.
Notre planète serait-elle en train de perdre le Nord ?
C'est à peu près ce qu'on lit depuis hier un peu partout dans la presse : le pôle Nord magnétique se déplace, en soi c'est tout à fait normal, mais il a tendance à se déplacer beaucoup plus vite ces dernières années, nous explique (entre autres) le journal russe Nezavisimaya Gazeta.
Earth's magnetic north pole is hurtling toward Russia so fast that it could be a problem for smartphone maps and navigation systems https://t.co/fOHbTJOXTepic.twitter.com/F5b1cBOSg9
— CNN International (@cnni) February 7, 2019
Une vitesse de 55km/an ces dernières années contre environ 15 km/an d'habitude : le pôle Nord magnétique, qui était localisé jusque-là au Canada, se retrouve aujourd'hui en Sibérie.
CNN nous explique qu'il a même fallu, début février, recalculer la position précise du pôle plus rapidement qu'on ne le fait d'habitude tous les 5 ans, pour ne pas que les GPS du monde entier soient complètement désorientés.
Earth’s magnetic north pole is migrating from Canada to Siberia: https://t.co/sJ6kC8dZtN
— Tom Parfitt (@parfitt_tom) February 5, 2019
Graphic from @naturepic.twitter.com/MIjdYtJUug
Pourtant la presse russe, ne tire pas particulièrement de fierté nationaliste, du fait que le pole nord soit devenu sibérien. Il faut dire que, selon un chercheur spécialiste de magnétologie à Saint-Petesbourg cité par la 5e chaîne de télé russe, cette accélération du mouvement magnétique terreste, générée par les mouvements au centre du globe d'une masse colossale de fer en fusion, laisse présager du pire, de la fin du monde !
Un inversement des pôles, ni plus ni moins, comme au temps où les dinosaures ont été rayés de la carte du Monde. Je vous rassure, il n'y a bien que ce chercheur russe qui lise la fin du monde dans sa boussole ; d'ailleurs la Nezavisimaya Gazeta nous rassure : le pôle Sud, lui, se tient plutôt à carreau pour le moment.