Le récit de Maria, exilée de la dictature brésilienne

Maria est née au Brésil en 1951, elle y a vécu jusqu'en 1982, date à laquelle elle a émigré en France. Maria, c'est la seule partie de son nom qui n'a jamais changé. Des deuxièmes prénoms et des noms de famille différents sont venus s'y ajouter selon les identités qu'elle a eues au cours de sa vie. La première, celle de sa naissance, puis celles d'après 1969, au moment où, en pleine dictature militaire au Brésil, l'étudiante en art, la caricaturiste de presse et militante communiste a dû entrer en clandestinité. Clandestine d'identité, elle l'est restée pendant plus de 40 ans, au Brésil puis en France. L'expérience de l'exil, de la fuite, de la persécution, a été celle de nombreux Brésiliens et Brésiliennes sous la dictature militaire qui a duré de 1964 à 1985. Celle de 42 ans de clandestinité est une histoire bien particulière.

C'était en octobre 2013. São Paulo, pour moi, c'est les bruits de sirènes de police. C'était une ville qui me hérissait les poils. C'était l'image de la police, de la répression, de la prison, de la torture, des assassinats... et ce jour, pour la première fois de ma vie, je n'ai pas le sentiment de peur à São Paulo.
En 1979, le régime de la dictature militaire brésilienne commence à s'ouvrir. Une loi d'amnistie permet aux exilés politiques de revenir au Brésil et aux personnes entrées dans la clandestinité pour échapper à la répression de vivre à nouveau au grand jour. La même loi garantit l’absence de poursuites contre les militaires tortionnaires ou auteurs de crimes. Maria veut elle aussi pourvoir revenir à sa véritable identité, pouvoir recommencer à vivre sans se cacher. Ce sera alors impossible. En 1981, Mitterrand remporte l'élection présidentielle française. Enthousiasmée par cette victoire, épuisée de devoir se cacher, Maria part pour Paris en 1982. Elle y vivra encore plusieurs décennies sous son nom d'emprunt. Ce n'est qu'en 2013 qu'elle retrouvera le droit de récupérer sa véritable identité au Brésil. Il faudra trois ans de plus pour faire comprendre la situation aux autorités françaises. Après plus de 40, Maria n'a plus eu à avoir peur quand on lui demandait son âge, n'a plus eu besoin de réfléchir pour répondre.
Une Histoire particulière : Les noms de Maria : la Clandestinité (1er épisode)
Un documentaire proposé par Rachel Knaebel, réalisé par Christine Diger. Prises de son : Laurent Lucas. Archives INA : Hervé Evanno.

Textes tirés de :
Lettre de Maria José Malheiros à Emiliano José, dans Galeria F, Lembranças do mar cinzento (v), A última clandestina em Paris e outras histórias, Emiliano José, Editora Caros Amigos, São Paulo, 2017.
Archives du Jornal da Tarde, édition du vendredi 6 avril 1973.
Bibliographie :
K. (roman), Bernardo Kucinski, Vents d'ailleurs, 2016.
Liens :
Commission nationale pour la vérité
Bibliographie
Dictature et lutte pour la démocratie au Brésil (1964-1985)L'Harmattan, 2005