Béatrice Giblin Béatrice Giblin ©France 5
Béatrice Giblin (photo: France 5) est professeur de géographie et directrice de [l’Institut français de géopolitique](http://www.geopolitique.net/). Elle a dirigé: *Dictionnaire des banlieues* , Larousse, 2009; *Nouvelle géopolitique des régions françaises* , Fayard, 2005. Elle est [intervenue](http://sites.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/planete/fiche.php?diffusion_id=74129) sur Planète terre en juillet 2009.
*1- Le vote du second tour confirme-t-il la carte électorale du 1er tour et des européennes de juin 2009?*
Oui : il est exceptionnel que la carte du premier tour soit invalidée au second, ce qui ne veut pas dire que cette carte sera celle de 2012 aux présidentielles, celle-ci dépendra de la stratégie électorale de la gauche solidaire : candidature unique dès le premier tour ou pas ; cela dépendra aussi de la mobilisation électorale qui sera beaucoup plus forte. Ce qui est confirmé c’est **l’implantation de la gauche dans des régions considérées comme traditionnellement de droite, sauf l’Alsace** où la mobilisation a incontestablement joué en faveur de la droite, un réflexe conservateur.
*2- Les expressions “France de droite et France de gauche, ligne Le Havre Montpellier, France de l’ouest et France de l’est” sont elles utiles ?* Au vu des résultats, **ces expressions sont dépassées** , si tant est qu’elles aient jamais été opératoires : au sud ouest, les territoires de la région **Midi Pyrénées** qui sont dans la France de l’ouest, réputée de droite, sont à gauche depuis des décennies. D’autre part, avec la **Bretagne** , les **Pays de la Loire** , **Poitou-Charentes** , ces élections confirme l’ancrage à gauche de la France de l’ouest observé ces dernières années. France de l’est et de l’ouest se rejoignent donc, ce qui montre quelle prudence il convient d’observer avec ce type d’expression. Dès que l’on change de niveau d’analyse, il convient d’être plus prudent encore. **A l’échelle du département ou du canton** , les zones de force des uns ou des autres est plus complexe par exemple, pour la première fois la gauche arrive en tête dans le département de la Vendée. Il s’agit bien dans cette conjecture d’un vote de défiance envers le président de la République et son gouvernement, et d’un vote non pas encore de confiance mais plutôt d’espoir envers la gauche.
*3- La répartition du vote FN vous surprend-elle ?*
Non. **Elle est assez stable dans ses bastions depuis plus de 20 ans.** La répartition du vote FN correspond à des **formations socio-culturelles diverses** selon les régions. Le vote en faveur du FN à Hénin-Beaumont (44%) dans le **Pas de Calais** n’a pas grand chose de commun avec le vote FN dans des villes comme **Antibes ou Nice** , tant au niveau des revenus des électeurs que de leur niveau culturel. A Hénin-Beaumont, où s’est implantée Marine Le Pen, il s’agit d’une ville autrefois minière, très touchée depuis longtemps par un taux de chômage élevé et affectée par des «affaires» qui ont discrédité les élus politiques locaux. Pour autant, deux remarques d’ensemble à propos de ce vote : d’abord, le rejet de la présence des immigrés et de leurs descendants : qu’on le veuille ou non le **vote anti-immmigré au sens large (descendants compris)** reste un des ressorts du vote FN ; deuxième remarque, l’implantation confirmée d’un **vote FN en milieu rural** , comme dans l’est de la Seine et Marne, la Beauce et certains milieux viticoles, Champagne et Bourgogne.
*4- Parleriez vous d’une nouvelle géopolitique du Nord Pas de Calais?*
Non, la gauche y reste majoritaire : 52% des voix. N’oublions pas que cette région fut le **premier laboratoire de la gauche plurielle** la première - et à ce jour unique - présidente écologiste régionale y fut élue en 1992.
**Le FN** y est implanté depuis la fin des années 1980, dans des territoires identifiés : la métropole lilloise (sud de Lille, Roubaix et Tourcoing) le centre du bassin minier entre Lens et Douai le littoral aux environs de Dunkerque et à Calais – le FN y est en forte hausse depuis la présence visible des migrants clandestins et enfin la vallée de la Sambre. Quand bien même l’abstention très élevée, avec 22% des voix le FN, reste une force politique qui compte.