Calme relatif au Sud-Liban, au milieu d'un Moyen-Orient sous pression
La face cachée du globe | Alors que le Moyen-Orient est traversé par de nombreuses crises, anciennes et nouvelles, la zone de la "ligne bleue", frontière technique entre le Liban et Israël tracée par l’ONU après la guerre de 2006, reste relativement calme, malgré quelques incidents en 2020.
La zone est placée sous l’étroite surveillance de la Force intérimaire des Nations unies pour le Liban (FINUL). Près de 11 000 casques bleus provenant de 45 nationalités sont déployés le long de la "ligne bleue".
Christian Chesnot s’est rendu au quartier général de la FINUL (Force intérimaire des Nations unies au Liban) à Naqoura pour rencontrer le général de brigade Jean-Pierre Fagué, chef d’état-major des casques bleus et représentant militaire de la France au Sud-Liban, qui détaille les enjeux et les difficultés de sa mission.
La FINUL fait partie des plus anciennes missions de maintien de la paix des Nations unies dans le monde. Comment a évolué son rôle sur le terrain depuis le premier déploiement en 1978 ?
A ses débuts et jusqu’à la guerre de l’été 2006, les effectifs de la FINUL ne dépassaient pas les 2 000 casques bleus. Aujourd’hui, elle compte près de 11 000 hommes et femmes déployés au Sud-Liban mais également en mer, puisque nous avons une composante maritime avec actuellement cinq bâtiments de premier rang.
C’est une force originale qui dispose d’outils très particuliers assez peu connus. Il s’agit par exemple d’un dispositif de liaison, du mécanisme tripartite - Israël/Liban/FINUL - qui nous permettent de remplir ce mandat rénové défini par la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l’ONU.
Le premier volet de notre mandat est de contrôler la mise en œuvre du cessez-le-feu par les parties. Il s’agit d’empêcher que la zone du Sud-Liban ne soit utilisée pour conduire des activités hostiles.
C’est aussi, en appui des forces armées libanaises (FAL), faire en sorte que la zone soit exempte d’armes, en dehors de celles autorisées, c'est-à-dire celles de la FINUL et des FAL. C’est enfin appuyer le retour en pleine souveraineté de l’armée libanaise dans cette région.
Quelle est la mission des casques bleus français ?
La France arme ce que l'on appelle la Force commander réserve (FCR), qui est la réserve d’intervention de la FINUL. Basé à Deir Kifa, le contingent français est capable d’intervenir en tout point de la zone d’opération. Doté d’environ 700 militaires, il est équipé de 45 véhicules blindés légers et 35 véhicules de l’avant blindés.
Avec ses capacités de très haute technologie, cette Force commander réserve, qui comprend aussi une compagnie d’infanterie finlandaise de 160 militaires, représente les yeux et les oreilles de la FINUL grâce à ses radars qui surveillent l’espace aérien.
Ici, au Sud-Liban, tout semble calme mais la situation peut dégénérer très vite et à tout moment.
Oui, la particularité est que la ligne bleue comporte plusieurs points qui sont contestés par certaines des parties. Ils peuvent donner lieu à des contentieux entre les forces en présence qui sont au contact l’une de l’autre à quelques dizaines de mètres seulement.
C’est pourquoi, jour après jour, la FINUL supervise l’ensemble des activités sur la "ligne bleue" et assure un canal de communication entre les parties.
Nous informons chacune d'elles, des activités que l’autre va mener. Quand l’une d’elle par exemple veut faire de la déforestation ou entretenir ses infrastructures de sécurité, nous informons l’autre partie. Nous surveillons les travaux toute la journée pour éviter qu’un incident ne se produise et déclenche une escalade.
Nous veillons sur la "ligne bleue" comme le lait sur le feu.
Avec un certain succès car quand on regarde depuis quatorze ans ainsi que la situation dans la région, on se dit que le Sud-Liban a été plutôt préservé de la guerre.
En 2020, y a-t-il eu beaucoup d’incidents frontaliers ? De quels types ?
Nous avons enregistré effectivement deux ruptures de cessez-le-feu. Pendant l’été 2020, il y eu quelques tirs d’artillerie avec des obus éclairants de nuit dont le but était de s’assurer qu’il n’y avait pas de brèches dans les dispositifs de sécurité des différentes parties.
Et puis l’année 2020 a été marquée par l’explosion tragique dans le port de Beyrouth. La FINUL, de manière tout à fait exceptionnelle, a engagé un détachement de génie pour aider au retour de l’activité opérationnelle des infrastructures portuaires
Avec le Hezbollah, qui bien implanté au sein de la population locale du Sud-Liban, comment se passe les relations avec la FINUL ? Il vous observe, vous les observez ?
Au Sud-Liban, nous travaillons avec l’armée libanaise. Elle est notre partenaire au quotidien. 20% de notre activité opérationnelle est faite de manière coordonnée avec elle, c’est-à-dire que nos patrouilles travaillent avec l’armée libanaise sur les mêmes axes.
Si vous avez l’occasion de sillonner le Sud-Liban, vous ne verrez pas d’autres armes que celles des FAL et celles de la FINUL.
Mais il est vrai que la région est à dominante chiite et que les partisans du Hezbollah sont présents. Mais je peux vous assurer que depuis ma prise de fonction à Naqoura, je n’ai pas vu une seule arme illégale.
Mais si vous découvrez une cache d’armes clandestine, quelle est la procédure ?
Nous intervenons avec l’armée libanaise et c’est elle qui, le cas échéant, saisira ces armes illégales. Il faut rappeler que seules les FAL disposent de l’autorité pour fouiller les véhicules qui pénètrent dans la zone de déploiement de la FINUL.
En décembre 2020, le matériel d’une patrouille de la FINUL a été confisqué par des villageois. Comment l’incident s’est-il réglé ?
L’incident a concerné une patrouille de la FINUL qui conduisait une mission logistique en dehors de la zone d’action des casques bleus comme cela arrive régulièrement, puisque nous avons des points d’entrée à l’aéroport et au port de Beyrouth.
Le convoi se trouvait sur un axe inhabituel. Dès qu’une patrouille sort des schémas habituels, il peut y avoir des sensibilités qui s’expriment dans certaines zones. C’est ce qui s’est produit.
Mais je dois dire que les quelques effets qui avaient été confisqués ont été rendus dans les heures qui ont suivies, suite à l’intervention très efficace de l’armée libanaise.
La mission de la FINUL prendra-t-elle fin un jour ?
La fonction de la FINUL est de créer un espace pour permettre les conditions d’un dialogue entre les parties pour un règlement définitif. C’est ce que nous faisons au quotidien.
Car l’important, c’est de trouver un accord sur les points frontaliers contestés, qu’on appelle "les zones réservées", pour qu’à la fin du processus de démarcation, les parties parviennent à un accord sur le tracé définitif de leur frontière terrestre et maritime.
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