Chaque vendredi, Arnaud Laporte et les critiques de La Dispute vous proposent une sélection de rendez-vous culturels pour votre week-end.
Toute cette semaine, les critiques de La Dispute ont une fois encore débattu pour vous du meilleur de l'actualité culturelle. Résultat de ces échanges en 5 récréations, un spectacle, un un disque, une exposition, un roman, un film. Bonnes découvertes !
Un spectacle : "La reprise – Histoire(s) du théâtre (i)", le coup de coeur du dernier festival d'Avignon
Le metteur en scène bernois a raflé tous les suffrages lors du dernier Festival d’Avignon, avec ce nouveau spectacle choc. Comme à son habitude, le nouveau directeur du Théâtre de Gand est parti d’un fait réel, a mené l’enquête, et a entrepris un savant travail de création pour aboutir à Reprise. Après le génocide rwandais, l’affaire Marc Dutroux ou le procès des Ceaucescu, Milo Rau s’est intéressé cette fois au meurtre sans raison aucune d’un jeune homosexuel à Liège en 2012, torturé par un groupe d’hommes qu’il ne connaissait pas, et qui l’ont laissé agonisant sur le bord d’une route. Avec six comédiens, dont deux amateurs, Rau déconstruit et met à distance pour ne garder que l’horreur des faits, sans le pathos. Reprise nous montre que le théâtre est encore capable de dire le monde, en faisant appel à toute l’intelligence du spectateur.
L'avis des critiques :
On se retrouve très vite plongé dans un état de sidération assez incroyable. Milo Rau mène un long travail d’enquête avant de s’attaquer à la matière. C’est cette façon qu’il a de tisser ce fait réel avec la vie de ses acteurs qui est très beau. Marie-José Sirach
La vidéo est quasiment omniprésente pendant le spectacle, puisqu’il y a deux régimes de réel. Les acteurs jouent sur scène et en même temps à l’écran. Il y a un côté très intelligent, jusqu’à peut-être la manipulation du spectateur et du fait divers. Lucile Commeaux
Nous public, on est convié à ce spectacle. Il y a ce départ, à mon sens très réussi, avec le casting des personnages pour lequel il va convoquer tout ce qui se passe au théâtre. Le réel rattrape la fiction et il joue avec ça. Anna Sigalevitch
Il est question à la fois du théâtre et de la représentation du monde. Puisque Milo Rau a un objectif : que le théâtre puisse remplacer le monde. Ce qui est une ambition folle, mais qui fait beaucoup de bien par rapport au paysage actuel. Arnaud Laporte
- Un spectacle : "La reprise – Histoire(s) du théâtre (i)" de Milo RAU - En tournée en Allemagne et du 22 sept au 8 octobre aux théâtre des Amandiers à Nanterre avec le Festival d'Automne à Paris / 9 > 11 janvier 2019 : Le Lieu Unique à Nantes / Et en tournée en Allemagne : plus d'informations sur le site du Festival d'Avignon.
Un disque : “Mulberry Violence”, de Trevor Powers, un disque au long cours
Si vous aimiez Youth Lagoon, vous serez attentif à ce premier disque que le musicien Trevor Powers signe de son seul nom, ayant mis fin à l’aventure en groupe. Le natif de l’Idaho a également délaissé (pour l’instant) la pop psychédélique pour se lancer dans une aventure intérieure sombre et expérimentale, mais non dénuée de douceur. Un disque à savourer au long cours.
- “Mulberry Violence”, de Trevor Powers
Une exposition : "Anarchitecte" de Gordon Matta-Clark, ou comment voir la ville autrement
Si l’on voit régulièrement des images d’immeubles méticuleusement percés de trous par ses soins pour offrir de nouvelles perspectives sur les villes, l’oeuvre de Gordon Matta-Clark reste méconnue dans sa globalité. Un manque heureusement comblé par l’exposition du Jeu de Paume, qui permet de mieux mesurer sa critique de l’architecture et son apport à son renouveau.
L'avis des critiques :
Voir Gordon Matta Clark au Jeu d ePaume est en soit une chose totalement réjouissante. Il a travaillé dans la ville et a une vision de la "peau des immeubles". L’écueil de la muséification n’est toutefois pas totalement contourné. Anaël Pigeat
Le risque avec une telle exposition c'est de « chosifier », de risquer d'aplanir l’œuvre. Pour moi cela permet de recontextualiser son travail, notamment très politique. En écoutant l’artiste, on se rend compte de la poésie de son geste. Mathilde Villeneuve
La question se pose quant à l’anarchie au musée. Le but de tout ça est de dire que la modernité et le modernisme en architecture a surtout enfermé. La muséification a tendance à sacraliser, j’ai découvert une part plus spirituelle de son œuvre. Florian Gaité
- "Anarchitecte" de Gordon Matta-Clark, jusqu'au 23 septembre au Jeu de Paume, Paris
Un roman : “Wild Side”, une balade dans le New York fiévreux des années 70 pour ce premier roman de Michael Imperioli
Connu pour son rôle dans Les Soprano, Michael Imperioli nous dévoile une autre facette de ses talents, avec ce roman drolatique qui nous plonge dans le New York des années 70, à la suite d’un jeune homme ayant grandi dans le Queens, et à qui un héritage inattendu va permettre de s’installer dans Manhattan. Il va suivre dans ses aventures son voisin musicien, un certain Lou Reed…
L'avis des critiques :
C’est un livre singulier, pas forcément le plus grand, mais qui a un charme particulier. Ce roman initiatique a un naturel dans sa façon d’être raconté qui m’a ému. On peut aussi le prendre comme un genre de conte de fées avec Lou Reed. Philippe Chevilley
C’est souvent très drôle, avec quelque chose de très naturel dans le livre. Cela m’a rappelé des livres de John Fante. Il y a toujours un risque à invoquer un personnage aussi connu. Lou Reed a ici un côté bienveillant, mais aussi inquiétant. Grégoire Leménager
Si on le considère comme un livre qui n’a pas d’autre prétention que celle de nous faire rentrer dans un autre univers, c’est réussi. L’intrigue tiendrait sur un post-it. On a quand même toujours l'impression d'être dans un roman "à la manière de". Jean-Christophe Brianchon
- Un roman “Wild Side”, de Michael Imperioli (Autrement)
Un film “Invasion”, de Kiyoshi Kurosawa
Si vous avez vu en début d’année le précédent film du cinéaste, Avant que nous disparaissions, vous aurez sans doute une impression de déjà-vu avec son nouvel opus. Sur une trame similaire, le japonais déroule un nouveau fil : à la suite d'événements mystérieux, il semblerait bien que les êtres humains deviennent incapables de ressentir des émotions !U
-En partenariat avec le magazine Grazia-