Les Britanniques votent ce jeudi pour choisir les 650 députés de la Chambre des communes, et ainsi désigner leur Premier ministre. A la veille du scrutin, les Conservateurs (au pouvoir) et les Travaillistes sont au coude-à-coude. Ces législatives sont même présentées comme les plus serrées en 41 ans. France Culture est à Londres pour analyser les enjeux de ces élections.
Impossible de dire à quoi ressemblera demain soir la nouvelle Chambre des communes. Ce mercredi encore, les sondages placent les Conservateurs du Premier Ministre sortant David Cameron (au pouvoir depuis 2010) et les Travaillistes d'Ed Miliband dans un mouchoir de poche. Mais ce qui rend l'issue de ces élections aussi incertaine, c'est également la place prise par les autres formations politiques. Ce qui se joue avec ce scrutin, c'est peut-être la fin du bipartisme britannique, comme l'explique Franck Mathevon , l'envoyé spécial permanent de France Culture à Londres, au micro d'Amélie Perrier dans les Matins :
En 2010, les Libéraux démocrates avaient joué les trouble-fêtes et avaient recueilli 23% des voix. Leur chef, Nick Clegg, avait alors pu obliger les Conservateurs à faire alliance. Devenu un parti de gouvernement comme les autres, les "Lib Dems" ne devraient pas pouvoir cette fois-ci compter sur le vote protestaire. Celui-ci se tournera sans doute davantage vers le UKIP, le parti europhobe de Nigel Farage, donné à 10% ou 15 %. A gauche, les Verts mordent sur l'électorat des Libéraux démocrates et des Travaillistes. Mais la sensation de cette campagne, ce sont les nationalistes écossais du SNP, qui pourraient remporter la quasi-totalité des 59 sièges écossais contre 6 seulement aujourd'hui. Franck Mathevon s'est rendu en Ecosse, à Paisley, près de Glasgow, pour le choix de la rédaction :
**** Les élections en chiffres :
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650 circonscriptions
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3971 candidats, dont 26,1% de femmes
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45 millions d'électeurs
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37 jours de campagne officielle (une durée record)
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81 sondages publiés pendant la campagne, à la date du 5 mai
Comment les électeurs vont-ils se décider ? A 24 heures du vote, certains n'ont toujours pas fait leur choix. L'envoyé spécial de France Culture, Abdelhak El Idrissi, s'est rendu dans la circonscription de Hampstead and Kilburn, dans le nord de Londres. Une circonscription intéressante car mixte : d'une côté, Kilburn, plutôt populaire, où les Travaillistes sont bien implantés. De l'autre, Hampstead, partie huppée du quartier où les Conservateurs espèrent faire le plein de suffrages. En 2010, les Travaillistes avaient remporté le siège de cette circonscription de justesse car les Conservateurs et les Libéraux démocrates avaient eux aussi recueilli plus de 30 % des voix. Cette année, on s'oriente vers un duel plus traditionnel, reportage :
Les Conservateurs vantent leur bilan économique, les Travaillistes pointent l'accroissement des inégalités
Parmi les sujets qui ont dominé la campagne, il y a l'immigration (placé au centre des débats par le parti eurosceptique UKIP), la sauvegarde du NHS, le service national de Santé (considéré comme le dernier rempart de l’État Providence), mais aussi et surtout les questions économiques , mises en avant par le Premier ministre sortant David Cameron. Il faut dire que les Conservateurs peuvent se vanter d'avoir ramené le taux de chômage à 5,6% de la population active l'an dernier. La croissance, elle, s'élève à 2,8% du PIB. La synthèse de Franck Mathevon , dans le journal de 12h30 d'Antoine Marette :
Les indicateurs économiques sont donc dans le vert, mais tout le monde n'en profite pas, loin de là. En témoigne la hausse de la fréquentation des banques alimentaires . Le Trussell Trust, qui est l'une des plus importantes associations de gestion des banques alimentaires du pays a noté une véritable explosion : 931.138 personnes ont fait appel à son réseau en 2013/2014 contre 128 697 en 2011/2012. Le chômage baisse, mais les contrats précaires se multiplient, à l'image du controversé "contrat zéro heure". De plus en plus utilisé, ce type de contrat ne mentionne aucune durée minimum de travail. Le salarié n'est payé que pour les heures effectuées, et doit être disponible à n'importe quel moment de la journée.
Abdelhak El Idrissi a rencontré Iain Pattisson , qui a connu ces contrats très précaires et qui aujourd'hui milite contre. C'est le Trait pour trait de ce mercredi :
Les conservateurs sous pression sur l'immigration, l'Europe abstente des débats
Avec la montée en puissance des eurosceptiques du UKIP, la question de l'immigration s'est imposée comme un thème central. Et les adversaires du Premier ministre sortant n'ont pas manqué de le mettre face à ses engagements en la matière. En effet, le solde migratoire du Royaume-Uni s'est élevé à près de 300.000 personnes l'an passé, bien loin des quelques dizaines de milliers promis par David Cameron il y a 5 ans. Les conservateurs peinent donc à convaincre sur ce sujet, comme le montre ce reportage de Franck Mathevon, à Peterborough, dans le centre de l'Angleterre :
Autre sujet très clivant : la position de Londres vis-à-vis de l'Union européenne. Le Royaume-Uni fait partie des 28 états membres, mais a toujours veillé à garder son autonomie : il n'appartient pas à l'espace Schengen, ni à la Zone euro. De manière assez étonnante, David Cameron et Ed Miliband ont soigneusement évité le sujet pendant la campagne. La discrétion du travailliste peut se comprendre, puisqu'il qui veut rester au sein de l'UE. En revanche, David Cameron a lui promis un référendum en 2017 sur l'appartenance à l'Union, mais il aborde pourtant très peu la question. Franck Mathevon a demandé son analyse à Charles Grant, directeur du Centre pour la Réforme européenne. Il explique pourquoi les Britanniques semblent plus favorables aujourd'hui au maintien du Royaume-Uni dans l'UE :
Réécoutez les Matins de France Culture de ce mercredi 6 mai, avec de nombreux invités en direct de l'Institut français de Londres, et suivez la journée de vote et les résultats dans nos journaux.
Ce qu'il faut savoir des élections législatives britanniques. Le Monde
Par les Décodeurs du Monde, ce mardi
Les 6 chiffres qui racontent les dessous des élections législatives britanniques. Le Temps
Par Aurélie Coulon et Catherine Frammery, ce mercredi