Alzheimer : Comment retarder l’entrée dans la maladie
Découverte | "Maintenant on a la possibilité, en recherche, de travailler sur les lésions de la maladie d’Alzheimer chez des gens normaux". Bruno Dubois, chef du service des maladies cognitives et comportementales de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, expose les dernières découvertes sur la maladie d'Alzheimer.
Oui, on arrive aujourd'hui à détecter les lésions de la maladie d'Alzheimer sur des personnes encore saines. Une incroyable avancée scientifique qui va bouleverser le traitement de cette maladie, comme l'explique Bruno Dubois, chef du service des maladies cognitives et comportementales de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière.
"Maintenant on a la possibilité, en recherche, de travailler sur les lésions de la maladie d’Alzheimer chez des gens normaux.
Aujourd’hui chez des patients avancés dans leur maladie, je peux affirmer qu’ils ont la maladie d’Alzheimer, mais je peux aussi le faire chez des gens qui sont au tout début de leurs symptômes, par exemple quand on a des petits troubles de mémoire. On peut se poser la question est-ce que c’est Alzheimer ou pas, hop on peut vérifier.
Ce qui est beaucoup plus intéressant, c’est qu’on peut même le faire chez des sujets normaux. Pourquoi ? Parce que les lésions de la maladie sont présentes avant les symptômes. Et ça change tout.
Ma conviction dans l’avenir, c’est que les médicaments qui sont actuellement développés ne marchent pas parce qu’ils sont proposés trop tard chez des gens qui ont déjà des lésions dans leur cerveau. On a montré que si on arrive à retarder ne serait-ce que de cinq ans l'entrée dans la maladie, on diminue de fait 50% des malades. Il y en a 800 000 actuellement en France. On passerait à 400 000 d'un seul coup si on arrivait à décaler un peu l'entrée dans la maladie. On a une signature biologique de la maladie."
Comment trouver les lésions d’Alzheimer ?
"Il y a deux façons de le faire :
1/ On injecte un ligand, on injecte quelque chose dans leur sang et puis ça va se fixer sur les lésions. On peut grâce à un PET Scan voir les lésions dans leur cerveau.
2/ Une autre façon plus simple, c'est de faire une ponction lombaire. On peut retirer du liquide qui montre les anomalies spécifiques du cerveau. Le cerveau étant dans ce liquide, on va récupérer les anomalies que les patients ont dans leur cerveau.
J'ai actuellement toute une cohorte de gens âgés de plus de 70 ans chez lesquels on a recherché ces lésions. Sur 320, 88 ont les lésions de la maladie alors qu'ils sont parfaitement normaux. On les suit et on va voir comment évolue la maladie. Quatre ans après, seuls quatre ont progressé vers la maladie d'Alzheimer. Donc il y en a très peu.
On va pouvoir les traiter, et peut-être va-t-on montrer qu'on décale la survenue de la maladie. On retarde l'entrée dans la maladie. C'est de la science-fiction, on n'en est pas là, mais ce sont les pistes d'avenir.
Elles sont extrêmement excitantes parce qu'on en est maintenant convaincus : ces maladies neurodégénératives, il faudra les prendre très très tôt, peut-être même avant les symptômes.
Il va falloir travailler sur cette approche préventive avoir des médicaments qui bloquent les lésions de la maladie et qui retardent l'entrée dans la maladie parce qu'on sait que les lésions anticipent la survenue des symptômes."