Des repas sans produits d'origine animale, mais aussi une vie détachée de tout ce qui peut être lié à l'exploitation animale (zoo, cirque, corrida, objets en cuir, laine, plumes, etc.), le véganisme séduit de plus en plus. Repères au moment où même des industriels de l'agroalimentaire s'y mettent !

Le mot francisé vient d’entrer dans nos dictionnaires : végane. Et les chiffres du salon Veggie World parlent d'eux mêmes : 129 exposants ce week end à Paris, contre 92 en avril, pour sa 1ère édition. 10 000 visiteurs attendus contre 7 200 visiteurs au printemps. On est encore très loin de l'Allemagne et de son million de véganes, mais la directrice du salon, Swantje Tomalak, évoque un mouvement qui s'accélère très vite, avec toujours plus de convertis. Par choix éthique, écologique ou de santé. Elle détaille un marché centralisé : 45% des près de 2 millions de végétariens français vivent en Ile-de-France (d'après l'association L214), avec aussi un développement en région lyonnaise. Mais il n'existe pas encore de statistiques fiables sur les véganes français. :

Il n'y a pas de portrait type du végane français, estime Swantje Tomalak. Même si elle ajoute que 80% de femmes ont visité son salon en avril. Les femmes font davantage attention à leur santé que les hommes, elles aiment souvent les animaux, et beaucoup viennent d'être maman, explique-t-elle :
A écouter : Paroles de véganes : "casser cette image de personne malade, pâlotte, hippie, bisounours et compagnie !"
Différentes sensibilités et philosophies

Les welfaristes sont favorables à des réformes en faveur de la condition animale. Les néo welfaristes, comme la plupart des associations, s'appuient sur des campagnes ciblées. En revanche, les abolitionnistes n'envisagent pas de réformes car ils considèrent notre rapport aux animaux esclavagiste. Et les anti spécistes, qualifiés de vegans radicaux, placent sur un même plan l'espèce humaine et les autres, et prônent une égalité de considération et une libération animale. On qualifie aussi de flexitariens ceux qui se permettent quelques consommations de chair animale, pour des événements sociaux notamment. Ces semi végétariens seraient de plus en plus nombreux.
A écouter : L'antispécisme est-il un humanisme ?
On ne compte plus les sites et les pages et comptes sur les réseaux sociaux, en particulier pour faire le tri au quotidien, ni les boutiques et restaurants véganes (il en existerait 50 à Paris, contre 66 à Montréal). Avec un moteur de recherche dédié et des cartes actualisées en ligne :
A Paris, où Amandine a lancé une pâtisserie spécialisée en 2011, et où elle relaie énormément d'informations sur la cause animale.

Militante depuis une quinzaine d'années, cette jeune femme originaire du sud ouest, qui préfère taire son nom de famille, considère que les changements actuels vont bien au-delà d'un effet de mode :
Amandine est aussi à l'origine d'une tribune publiée fin septembre dans "Le Monde" et signée par 28 personnalités, dont la députée EELV Laurence Abeille, Yann Arthus-Bertrand et Alain Bougrain-Dubourg :
Tribune ds @lemondefr signée par 28 personnalités
— Vegan Folie's (@VeganFolies) September 20, 2016
"Nous décidons de prendre parti et d’être solidaires des #animaux."#vegan#stopabattoirspic.twitter.com/cy11VuZiNY
L'alerte de l'OMS au sujet de la viande rouge, les vidéos choc d'abattoirs, de l'association L214, ainsi que des livres à succès comme celui d’Aymeric Caron ont marqué les esprits. L'opinion publique a été touchée et des politiques ont réagi avec la création fin mars d'une commission d'enquête parlementaire sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie. Pendant que la classe politique reste avant tout liée aux lobbys de l'agro-alimentaire, de la chasse ou du foie gras, le véganisme interroge de plus en plus au pays de la tête de veau et du jambon beurre. Une enquête de l'émission "Cash investigation" vient justement de révéler les secrets de fabrication du jambon bien rose, à coup de sel et de nitrite de sodium... Et certains très grands chefs suivent la tendance. Alain Passard a été le premier à se passer de viande pour "faire du légume un grand cru". Puis, Alain Ducasse a choisi la cuisine de la naturalité. Sans oublier Joël Robuchon, Thierry Marx ou d'autres.
A lire : L214 : des vidéos choc pour en finir avec la "viande heureuse"
Des personnalités, artistes, sportifs, se revendiquent plus ouvertement végétariens, végétaliens voire véganes, et médiatisent aussi le message.
Et preuve de ce phénomène, des industriels de l’agro alimentaire ou de la grande distribution eux-mêmes investissent : Carrefour, Monoprix, Danone, Herta ou des glaciers comme Amorino. Fini aussi l'usage d'ichtyocolle a promis Guiness dans la fabrication de sa célèbre bière. Cette colle obtenue à partir de vessie d'esturgeon n'était pas assez "vegan friendly", quitte à modifier une recette de 256 ans d'âge !

Bibliographie
Libération animale et végétarisation du monde : ethnologie de l'antispécisme françaisCatherine-Marie DubreuilCTHS, Paris. Collection Le regard de l'ethnologue, n° 28, 2013
Antispéciste : réconcilier l'humain, l'animal, la natureAymeric CaronDon Quichotte, 2016
Petit traité de véganismeGary FrancioneL'âge d'homme, 2015
Ma petite boucherie veganSébastien Kardinal et Laura VeganPowerLa Plage, 2016
Bêtes humaines ? : pour une révolution véganeMéryl PinqueAutrement, 2015

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