C’est le spectacle qui fait le "buzz" à Avignon : "Au moins j’aurais laissé un beau cadavre", une mise en scène de Vincent Macaigne, adaptée d’Hamlet de Shakespeare, et présentée au Cloître des Carmes, séduit la critique comme le public.Et pourtant, il me faut modérer ici l'enthousiasme général…
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Difficile d’être à contre courant quand tout le monde, ou presque, semble unanime. Devant le travail de ce jeune metteur en scène, Vincent Macaigne, je me sentais un peu perdue. Qu’est ce qui peut séduire le public que je n’arrive pas à voir ? c’est la question que je me suis posée pendant les 4 heures que durait la représentation. Macaigne adapte "Hamlet" à sa sauce. Comme dans ses précédents spectacles, il joue sur le plateau une sorte d’urgence absolue qui prend à bras le corps un texte totalement réécrit ou presque, un public fréquemment pris à partie, des acteurs ultra sollicités et une scène qui ressemble à un vaste capharnaüm. Le mode est hystérique. Ca hurle quasiment tout le temps. Musique à fond et débauche de corps qui se jettent dans la bataille. C’est sûr, il y a de la vie. On voit bien la rage qui anime la troupe, qui la propulse sans ménagement dans une brutalité continue. On voit bien que pour Vincent Macaigne, le théâtre est le lieu où doivent se hurler désir de vie et pulsion de mort.
Ce théâtre est physique, sensuel, sexuel. On s’y met à poil avec une évidence confondante. On y mélange fumigènes, lumières vives et jets d’hémoglobine. On y interpelle le spectateur avec force. Bref, tout est là pour que ce même spectateur reste littéralement scotché devant le tableau furieux qui s’offre à ses regards. Et pourtant, loin d’être scotchée, je me suis peu à peu retirée de cette cérémonie, ne trouvant aucune porte d’entrée dans ce qui, à mon sens, ne développe qu’une tension de surface. Une tension sans fondement réel, uniquement axée par exemple sur les « putain merde » criés à répétition ou le haut niveau des décibels . Est-ce que ce théâtre là est si contemporain ? Pas sûr. Oui, Macaigne casse les formes. Mais, en produit-il une nouvelle ? Je n’en suis pas vraiment convaincue et à mes yeux, ravager une scène en misant tout sur l’exhibitionnisme et l’hystérie ne signifie pas forcément mettre en scène.
" Au moins j’aurai laissé un beau cadavre", d’après "Hamlet" de William Shakespeare. Cloître des Carmes. Jusqu’au 19 juillet.